Ouverture du discount Atacadao en France : une « arme anti-inflation » ou « pro-bénéfices » ?

La marque Carrefour lance un nouveau type de discount sur le territoire français, avec un choix réduit et des prix cassés : mais les promesses de cette multinationale de la grande distribution seront-elles à la hauteur des attentes et des besoins des consommateurs ?

 

Annoncé dès octobre 2022 par le PDG de Carrefour, le premier magasin ATACADAO en France a ouvert ses portes le 20 juin dernier à Aulnay-Sous-Bois, en Seine-Sain-Denis (93).

ATACADAO, ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais vous serez certainement amené à l’entendre de plus en plus. Rachetée en 2007 par le groupe Carrefour, cette entreprise brésilienne, qui dispose de 300 magasins au Brésil, vend des produits de consommation courante à des prix cassés, grâce à un concept de « magasin-entrepôt » où les produits sont directement stockés dans les rayons et où le client se sert dans les cartons. Ces magasins incitent les consommateurs à acheter en gros, car le prix est dégressif en fonction de la quantité achetée : des produits comme le sucre, la farine, le riz, peuvent ainsi s’acheter par paquets de 10 ou 20 kg, à des prix défiant – en théorie – toute concurrence.

En France, le concept a pris du temps à se concrétiser : d’abord prévu à Sevran, qui a refusé l’implantation du magasin sur son territoire, le magasin a finalement été accueilli par la ville d’Aulnay-Sous-Bois, en lieu et place d’un ancien hypermarché Carrefour. Le jour de l’ouverture, des clients ont fait le déplacement des communes de Seine-Saint-Denis avoisinantes, et même du Val-d’Oise pour tester le concept et profiter de promotions. Cependant, les avis sont mitigés. Si des clients se réjouissent de profiter des prix dégressifs en quantité, notamment pour subvenir aux besoins de familles nombreuses, d’autres pointent du doigt une différence de prix parfois minime avec d’autres enseignes, surtout si ces produits sont achetés en faible quantité. L’aspect « entrepôt » et les larges allées sans signalétique peuvent aussi confondre certains visiteurs. Enfin, l’un des clients interrogés par Le Parisien souligne que tout est fait pour pousser à la surconsommation, en particulier de produits sucrés et caloriques.

Un discount très lucratif

              En effet, on peut s’interroger sur l’intention de ce genre de magasins. Derrière la façade d’un discount « anti-crise » qui profiterait aux populations les plus précaires, se profile une stratégie très rentable pour Carrefour, visant à accroître encore davantage son chiffre d’affaires. Au Brésil, l’enseigne représente les deux tiers du chiffre d’affaires de Carrefour et 80% de sa rentabilité. En France, le magasin s’adresse à la fois aux professionnels, en ouvrant dès 7 heures, mais également aux particuliers, que l’enseigne compte attirer pour en faire 70% de son chiffre d’affaires. Cette double casquette lucrative ne profite cependant pas aux salariés de l’entreprise. Pour faire fonctionner le magasin d’Aulnay-Sous-Bois, ils sont 220, un tiers de moins qu’à l’époque de l’hypermarché Carrefour. Un plan de départ volontaire a écrémé l’équipe de 96 salariés. On peut donc supposer, pour les salariés restants, un travail plus pénible et plus précaire, sur une surface immense de 10 000 m². Cela fait écho aux conditions de travail dégradées dans d’autres discounts, comme la franchise Action, qui avait déjà fait l’objet d’une enquête en 2024.

              Qui plus est, la promotion des lots de 10 ou 20 produits similaires incite surtout les clients à consommer plus que ce dont ils ont besoin, et la différence de prix passe au second plan. Certains produits, comme l’eau gazeuse de marque par exemple, sont même vendus plus chers que dans des enseignes voisines, comme Auchan ou Leclerc. Plus qu’un « coup de pouce » financier, il s’agit bien de faire acheter beaucoup, et pas toujours de la meilleure qualité, à des populations précaires qui espèrent trouver une marge de dizaines de centimes sur leurs achats. Nous sommes loin d’un projet philanthrope, et plus près d’une manne financière qui repose sur des consommateurs plus vulnérables. Ça n’est d’ailleurs pas un hasard si le magasin ouvre à Aulnay-Sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, et non dans les banlieues plus aisées d’Île-de-France.

              La direction de Carrefour a annoncé tester dans un premier temps le concept avant d’envisager, en cas de succès, l’ouverture de nouveaux points de vente à travers la France. Nous espérons néanmoins que cette expansion ne se fera pas aux dépens d’un salariat plus précarisé et de consommateurs moins bien informés sur ce qu’ils achètent.

Ndlr : Le titre reprend les propos du PDG de Carrrefour Alexandre Bompard, qui a parlé d'Atacadao comme d'"arme anti-inflation" lors de l’inauguration du projet en 2022. Source : lsa-conso.fr

Rentrée 2024 : Quels prix et quelles aides pour les fournitures scolaires ?

Alors que commencent à peine les vacances scolaires, l’achat des fournitures pour la rentrée est déjà une préoccupation pour de nombreux foyers en France. Malmenés par les inflations successives de 2022 et 2023, les familles espèrent ne pas subir des difficultés supplémentaires pour l’achat de matériel scolaire. Les premières indications de prix et d’aides à l’achat pour la rentrée 2024 devraient les rassurer.

               

Alors que l’an dernier, le prix des fournitures avait bondi de 11% par rapport à l’année précédente, la rentrée 2024 va également amener son lot d’augmentations. Comme le souligne notre secrétaire générale Julie Vanhille interrogée par RMC Conso, c’est probablement le papier qui sera le plus touché, ayant déjà subi une hausse de 34% à la rentrée dernière, ainsi que le matériel scientifique. La marque Maped a d’ores et déjà annoncé une augmentation sur son matériel, mais elle devrait se limiter à 1%, rien à voir avec les écarts de l’an dernier. La hausse des prix, due à l’augmentation du prix des matières premières et de l’énergie, devrait donc être moins forte qu’en 2023.            

Globalement, on peut même s’attendre à ce que le prix de la liste totale des fournitures scolaire baisse de 1 à 2% par rapport à l’an dernier, selon le directeur de l’enseigne Bureau Vallée, interrogé par Capital. Et les prévisions ne devraient pas changer d’ici à la rentrée, selon lui, car les prix ont été négociés dès décembre 2023 auprès des fournisseurs. De quoi rassurer la plupart des familles, même si la rentrée reste un moment de fortes dépenses. A ce propos, des solutions existent pour éviter des dépenses inutiles : effectuer un inventaire du matériel déjà disponible à la maison, réutiliser des cahiers dont les pages n’ont presque pas été utilisées, ou encore privilégier la vente d’occasion pour des fournitures comme les sacs, trousses ou classeurs. Si les promotions en magasin semblent constituer de bonnes affaires, attention à l’achat de lots inutiles et finalement plus coûteux. Julie Vanhille conseille ainsi de comparer le prix au nombre de pages, à l’unité, ou de partager des lots entre voisins, surtout pour des biens périssables comme les tubes de colle.

 

 Des aides en hausse pour 2024.   

            

Autre nouvelle rassurante pour les familles les plus précaires : l’allocation à la rentrée scolaire (ARS) a été revalorisée au 1er avril 2024. Il s’agit d’une aide financière proposée par la CAF et la Mutualité sociale agricole (MSA), qui dépend de l’âge et du niveau de scolarisation de l’enfant. Si vous êtes allocataire de la CAF, elle vous est versée automatiquement dès lors que vos ressources annuelles ne dépassent pas 27 141 € pour un enfant, 33 404 € pour deux enfants, 39 667 € pour trois enfants et 45 930 € pour quatre enfants ou plus. En 2024, ces aides augmentent de 4.6 %, passant à 406,98€ pour les enfants de 6 à 10 ans, 436,37 € pour ceux entre 11 et 14 ans, et 454,59 € pour les adolescents de 15 à 18 ans. A noter que si votre enfant à moins de 6 ans au passage en CP, il faudra transmettre à la CAF un certificat de scolarité, et s’il a entre 16 et 18 ans, une déclaration est nécessaire pour attester qu’il est toujours scolarisé ou en apprentissage. Ces sommes revalorisées, qui devraient être versées le 20 août, aideront certainement les plus défavorisés à compenser l’inflation.               

Néanmoins, les fournitures scolaires ne sont pas la seule source de dépenses en période de rentrée : on peut y ajouter les frais des activités extrascolaires, dont nous avons déjà parlé, ou de restauration, qui augmenteront plus ou moins en fonction des collectivités – on attend par exemple une hausse de 30 centimes dans les collèges du Rhône (69).

L’Adéic reste vigilante à l’augmentation des prix ainsi qu’à l’accessibilité, pour chaque famille, aux fournitures et services dont elles ont besoin, quels que soient leurs revenus.

Activités extrascolaires : quel budget et quelles aides pour la rentrée 2024 ?

Dès le début de l’été, de nombreuses familles engagent des démarches pour inscrire leurs enfants à des activités en dehors du cadre scolaire. Si les propositions des associations, des clubs, des municipalités ou des structures privées sont multiples, elles ne sont pas toujours accessibles, et les aides sont parfois peu connues des ménages les plus précaires.

Qu’elles soient sportives, culturelles ou artistiques, les activités extrascolaires peuvent constituer un temps d’ouverture et d’enrichissement pour les enfants. Néanmoins, à la différence du périscolaire, ces loisirs ont un coût, plus ou moins élevé selon les structures et la situation familiale, mais qui risque de dissuader certains parents. En 2021, une étude relayée par l’Institut National de la Consommation (INC) estimait le coût moyen d’une activité extrascolaire à 134€ par an, au niveau national, et le prix moyen de l’équipement associé à 55 €/an. Mais ces chiffres sont à relativiser, d’une part à cause de la récente inflation, et d’autre part en raison de la grande disparité des prix en fonction des activités et du territoire. Par exemple, l’inscription à une activité sportive hebdomadaire pour enfant au Paris Université Club (PUC) coûte déjà 340 € pour 2024-2025. De la même manière, un équipement d’équitation coûtera bien plus cher qu’un équipement de ping-pong…

En 2021, le rapport de l’INJEP, dédié au temps et activités péri et extrascolaires, indiquait déjà une baisse de fréquentation des activités encadrées, passant de 59% à 36% des familles interrogées. Mais il faut la replacer dans le contexte de la crise sanitaire, et l’Institut n’a pas encore publié de rapport plus récent. Néanmoins, l’inflation record enregistrée en 2022 et 2023 a probablement fait baisser le nombre d’inscriptions. Comme le rapportait France Bleue Provence en septembre 2023, certains parents ont fait le choix de limiter les activités à une seule par enfant, de restreindre le nombre de cours par semaine, ou encore de réduire leurs propres dépenses de loisirs pour privilégier celles de leurs enfants.

Des aides accessibles aux plus précaires

Qu’en sera-t-il cette année ? Si l’inflation suit une tendance à la baisse en 2024, il est difficile de savoir dans quelle mesure cette tendance se répercute sur les prix des activités et loisirs. En attendant, les familles les moins aisées peuvent compter sur des aides et des ajustements. Certaines maisons d’associations proposent des activités à prix variable, en fonction du quotient familial. C’est le cas des centres Paris Anim’, à Paris. En fonction des ressources du foyer auquel appartient l’enfant inscrit, le tarif est plus ou moins élevé : le Quotient Familial (QF) 1 correspond à des ressources mensuelles inférieures ou égales à 234 € tandis que le QF10 correspond à des ressources supérieures à 5000€. Par exemple, pour une activité hebdomadaire d’une heure, le foyer correspondant au QF1 paiera   92,60€ l’année, tandis qu’un foyer au QF10 règlera 255,90€ pour son enfant (tarifs 2024-2025, disponibles via le lien ci-dessus).

Outre ces tarifs variables, la CAF propose également des « Tickets Loisirs Jeunes » d’une valeur de 50€ par enfant. Ils sont accessibles aux familles allocataires qui bénéficient au mois d’octobre de l’année précédente d’une prestation familiale et/ou de l’aide personnalisée au logement et/ou du RSA ou de la Prime d’Activité, et dont le Quotient Familial est inférieur à 500€ l’année de la demande. Elle peut servir à payer une licence, une inscription, une adhésion ou des équipements, en une ou plusieurs fois. En fonction des situations des parents, certains Comités Sociaux et Economiques (anciennement Comités d’Entreprise) proposent également une prise en charge de tout ou partie des frais extrascolaires. Les parents peuvent se renseigner auprès de leur entreprise, dès lors que celle-ci dispose de plus de 50 salariés.

Néanmoins, on peut rappeler qu’en France, la présence ou non d’activités extrascolaires et leur nombre est un fort marqueur social : d’après le Haut Conseil de la Famille, 84% des enfants de familles disposant d’un revenu supérieur à 2 2250 € nets/mois ont une activité régulière, contre 32% des familles à bas revenus. De plus, la multiplication d’activités, pour les familles qui peuvent se le permettre, n’est pas pour autant le marqueur d’un plus grand épanouissement, et peut au contraire être un facteur d’épuisement. Le plus judicieux est peut-être d’écouter aussi bien les enfants sur leurs besoins que les parents sur leurs contraintes budgétaires.

Inflation : comment s’équiper en produits d’hygiène sans se ruiner

Julie Vanhille, secrétaire générale de l’Adéic, est intervenue sur RMCConso pour parler de l’achat de produits d’hygiène dans un contexte d’inflation, et proposer des pistes pour lutter contre la précarité hygiénique et menstruelle.

Son intervention est à retrouver dans l’article en lien : https://rmc.bfmtv.com/conso/conseils-d-achat/mieux-consommer/shampoing-gel-douche-protections-periodiques-comment-s-equiper-en-produits-d-hygiene-sans-se-ruiner_AN-202402260651.html

Inflation : quel bilan pour 2023 ?

            Depuis 2022, l’inflation fait partie de notre quotidien et nous en entendons parler chaque jour dans les médias. La conjonction de crises politiques, économiques et climatiques a beaucoup pesé sur le porte-monnaie des ménages, mais si l’année 2022 a été marquante par la hausse des prix, l’année 2023 a été plus contrastée, livrant un bilan mitigé.

Selon les derniers chiffres de l’INSEE, l’inflation en décembre 2023 a été de 3,7 %, avec un rebond de 0,2% par rapport à novembre, en raison de l’accélération des prix de l’énergie et des services. Si elle continue de peser sur la population française, le bilan de l’inflation semble moins préoccupant que l’an dernier à la même période, où elle atteignait le pic de 6,3% en février 2023. Une décrue inflationniste semble donc engagée en France, et l’on peut s’attendre à ce que les prix augmentent moins vite, même s’ils continueront d’augmenter.

Si l’on regarde dans le détail, l’année a été cependant marquée par une forte inflation des produits alimentaires, avec une hausse de 7,1% en décembre 2023, mais en décrue par rapport à novembre, où elle atteignait 7,7 %. Les produits frais ont subi une forte hausse (de 6,6% en novembre, à 8,8% en décembre), tandis que les « hors frais » ont été plus épargnés. Mais ce sont surtout les prix de l’énergie qui ont augmenté, avec une hausse de 5,6% sur un an en décembre, contre 3,1% en novembre, notamment en raison d’une augmentation constante des prix du gaz, aggravée par les tensions géopolitiques et une dépendance des importations. Sans compter qu’une nouvelle hausse de l’électricité est d’ores et déjà annoncée début 2024. Les services (locations, assurances…) ont également subi une hausse de 3,1 % en décembre, après 2,8% en novembre.

Augmentation des prix : le rôle opaque des industriels.

Cette inflation est certes due à une situation géopolitique de plus en plus tendue, mais on ne peut ignorer le rôle des industriels, notamment agroalimentaires, et des entreprises de grande distribution dans le gonflement des prix. En effet, plusieurs associations de consommateurs ont dénoncé une augmentation inédite des marges des gros industriels, qui seraient passé, selon elles, de 28% à plus de 48% entre 2021 et 2023[1]. En mars 2023, Fabio Panetta, membre du directoire de la Banque Centrale européenne, dénonçait déjà le « comportement opportuniste des entreprises qui pourrait retarder la baisse de l’inflation », jugeant que certaines d’entre elles « augmentaient les prix au-delà de ce qui était nécessaire pour aborder les augmentations de coûts[2] ». Cependant, l’association Adépale, qui réunit les PME de l’industrie agroalimentaire, y voit un amalgame, estimant que leurs industriels « ont des marges faibles, bien loin des 48% » dénoncés par les associations[3]. Quelle que soit la teneur de ces marges, les marques ont continué à demander des hausses de prix pour l’année 2024, des augmentations justifiées selon elles par des coûts qui continuent d’augmenter, et la baisse des volumes de vente.

2024 : quelles perspectives ?

Face à cette situation inflationniste, le gouvernement a cherché à faire pression auprès des raffineurs, afin de modérer les prix à la pompe. Bercy a également réclamé un effort aux industriels pour limiter le gonflement des marges et l’envol des prix dans les rayons. Ces initiatives ont pu donner quelques résultats, car les derniers chiffres de l’inflation calculés par l’Insee sont meilleurs que prévus. Cependant, le rétablissement d’une taxe sur l’électricité, qui devrait augmenter de 10% en février, pour renflouer les comptes publics, ne sonne pas comme une bonne nouvelle, et fait craindre un début d’année difficile…

Selon Olivier Garnier, directeur des études statistiques de la Banque de France, l’inflation devrait converger vers la barre des 2% au plus tard fin 2025[4]. En attendant, l’Insee prévoit une inflation à 2,6 % sur un an en juin prochain, tandis que la Banque de France l’estime à 2,5 % fin 2024. Quels que soient les chiffres à venir, les consommateurs doivent s’attendre à des prix qui continuent d’augmenter, moins vite on l’espère que l’année passée. La France – et l’Europe – sont prises dans une inflation de longue durée. Il reste à espérer que les grandes entreprises n’accroissent pas encore leurs marges sur des produits de première nécessité, et que le gouvernement adopte rapidement des mesures concrètes pour soutenir les ménages les plus précaires.

 

Sources :

[1] https://www.foodwatch.org/fr/actualites/2023/inflation-alimentaire-les-marges-indecentes-de-l-industrie-et-de-la-grande-distribution-dans-le-viseur

[2] https://www.ecb.europa.eu/press/key/date/2023/html/ecb.sp230322_2~af38beedf3.en.html

[3] https://www.capital.fr/entreprises-marches/inflation-alimentaire-le-debat-sur-lencadrement-des-marges-des-marques-refait-surface-1487028

[4] Principal frein à l’activité en 2023, l’inflation poursuit son reflux (usinenouvelle.com)

Jamais le budget des Français n’a été aussi malmené !

Jamais le budget des Français n’a été aussi malmené !

Depuis janvier dernier, les hausses de prix sont infernales dans de nombreux domaines, avec un rythme de 3 à 4 % par mois. En avril, le panier de référence comportant 31 produits essentiels avait atteint pratiquement 20 % de hausse sur un an. Selon l’Insee, les produits alimentaires ont bondi de 16 %. (https://www.insee.fr/fr/statistiques/7453512)

Compte tenu de la situation économique, qui impacte gravement le budget des foyers les plus modestes, le gouvernement a demandé aux enseignes de la grande distribution de fournir un effort sur les prix. Elles ont donc mis sur pied, depuis le 15 mars dernier, une opération spéciale appelée « trimestre anti-inflation », son financement reposant sur la réduction de leurs marges. L’objectif ciblé est de présenter une liste de produits de base (alimentation, hygiène) en garantissant des prix « les plus bas possibles ». Un logo gouvernemental doit permettre d’identifier ces produits en rayons de supermarché. Ses conditions d’utilisation tiennent en quatre points : fournir un effort sur le prix, assurer la disponibilité du produit ou d’un équivalent, l’identifier clairement, ne rien facturer en plus au fournisseur.

La bataille des prix et les résultats observés !

Les efforts des distributeurs étant basés sur le seul volontariat, chacun a donc pu faire ce qu’il voulait pour ce panier anti-inflation. Par ailleurs, si les prix du panier retenu par un distributeur baissent ou restent sans doute stables durant la période ciblée, l’augmentation peut concerner évidemment d’autres types de produits de l’enseigne. La revue « 60 Millions de consommateurs », a donc choisi de se plonger dans les offres et promotions des supermarchés, afin de déterminer quelles sont les plus généreuses, les plus équilibrées, les plus adaptées, mais aussi pour pointer les enseignes les moins engagées dans cette campagne anti-inflation.

Le pourcentage de réduction annoncé par Bercy loin d’être atteint selon les associations de défense des consommateurs

Reconnaissons toutefois que la bataille des prix, sous l’œil de Bercy, a bien eu lieu au cours de ce trimestre anti-inflation mais sans doute de façon assez inégale selon les distributeurs et les régions. Les principales enseignes ont engagé des moyens pour limiter les hausses des produits figurant dans les listes qu’elles ont choisies d’établir (différentes suivant les supermarchés). Ce que le Ministre de l’Économie, Bruno Lemaire et la Ministre déléguée au commerce, Olivia Grégoire, se sont empressés de souligner, en déclarant que l’initiative avait permis de « réduire d’en moyenne 13% le prix des produits concernés par le trimestre anti-inflation dans les grandes surfaces ». Le gouvernement souhaite évidemment, dans le contexte actuel, pouvoir poursuivre la démarche engagée, et il faut donc que l’opération apparaisse d’ores et déjà comme une réussite, en mettant en avant l’engagement responsable de la grande distribution.
Les associations de défense des consommateurs sont moins optimistes, les chiffres indiqués par le gouvernement (baisse de 13 % des prix) s’avèreraient en fait loin d’être atteints, d’autant que les produits intégrés dans le panier anti-inflation diffèrent d’une enseigne à l’autre. La mise en place du panier anti-inflation a été aussi variable, plus ou moins rapide suivant les entreprises. Parmi les enseignes qui se sont engagées dans l’opération, les prix des produits en question auraient baissé seulement de 5 % en moyenne. 

Quelles suites envisagées ?

Une question se pose désormais : que se passera-t-il concrètement à la fin de ce trimestre anti-inflation, au début de l’été et durant les congés estivaux ? L’action anti-inflation engagée dans les supermarchés pourra-t-elle être poursuivie durant plusieurs trimestres et sous quelles conditions ?

Les prix des grandes marques se sont en effet envolés vers des sommets, bien supérieurs à la moyenne de leurs rayons, durant ces dernières semaines. Logiquement et sauf exception (chez Monoprix par exemple), il n’y a pas de marques nationales intégrées dans ces listes anti-inflation. Dernièrement Intermarché et Casino ont dressé des listes fortes de 500 articles. Casino affirme avoir baissé les prix d’environ un tiers d’entre eux, de 10 à 15 %. Mais il faut noter que l’enseigne avait beaucoup augmenté ses prix durant les mois précédents.

En attendant les annonces sur les nouvelles mesures prévues pour combattre l’inflation, prenez la précaution de comparer les prix des produits avant d’acheter…Et n’hésitez surtout pas à nous faire remonter vos constatations au plan local, notamment les hausses injustifiées observées sur certains types de produits. Nous nous en ferons écho auprès de la DGCCRF (Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes).

 

Quand l’inflation s’envole, il est impensable de baisser encore les subventions aux organisations de défense des consommateurs !

Paris, le 3 octobre 2022,

Quand l’inflation s’envole, il est impensable de baisser encore les subventions aux organisations de défense des consommateurs !

 Lettre ouverte à Monsieur Bruno Le Maire, Ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Monsieur le Ministre,

Dans le contexte économique actuel, de hausse des prix des matières premières, des denrées alimentaires, de l’énergie, les citoyens consommateurs ont plus que jamais besoin d’être guidés conseillés, accompagnés.  A ces augmentations tarifaires s’ajoutent une explosion des litiges de la consommation dans certains domaines (commerce en ligne, fraudes à la carte bancaire, droit des assurances, démarchage téléphonique…).

Les associations nationales de consommateurs agréées, que nous sommes, sont très sollicitées sur le terrain : information juridique, règlement amiable des litiges, les actions en justice, l’accueil des consommateurs dans les permanences de proximité, permanences téléphoniques, réponses par e-mail. Les canaux de sollicitations sont nombreux, et les sujets de préoccupations de consommateurs toujours plus vastes.

Pour répondre à ces attentes légitimes des consommateurs, il existe en France 15 associations nationales de défense des consommateurs agréées. Et 15 associations c’est peu pour couvrir l’ensemble des demandes des consommateurs sur le territoire.

 Cet agrément, est une garantie pour les consommateurs de légitimité, de compétence et d’indépendance vis-à-vis des professionnels avec lesquels ils sont en litiges.

Pour garantir cette indépendance, les sources de financement des associations de consommateurs agréées sont exclusivement publiques. Parmi ce financement se trouve une subvention annuelle entre l’État, représenté par la Direction Générale Concurrence, Consommation et Répression des Fraudes (DGCCRF).

En contrepartie de ces crédits d’intervention, chaque association signe une convention annuelle d’objectifs et de moyens avec la DGCCRF et met en œuvre un programme d’actions au service de l’information, de la représentation et de la défense des consommateurs.

Comme vous le savez, Monsieur le Ministre, depuis plus de 10 ans on assiste à une baisse des effectifs de la DGCCRF et de ses services déconcentrés. Ces restrictions budgétaires ont touché à la fois les services de contrôle et les services d’accueil des consommateurs. Dans le même temps, les associations de consommateurs ont été également durement touchées avec des baisses récurrentes des subventions de l’État.

Parallèlement, les consommateurs sont confrontés à de nouveaux défis, à de nouvelles difficultés et malgré les coupes successives, nos associations tentent de plus en plus difficilement de poursuivre leurs missions de service public.

L’objectif de l’administration est clair, celui de réduire au maximum, le nombre d’associations de consommateurs agréées, le nombre d’associations de consommateurs reconnues par l’État.

Pour atteindre cet objectif, l’administration nous pousse au regroupement. Ainsi, en 2019, nos trois associations de consommateurs agréées ADEIC, ALLDC, CNAFAL, ont créé l’Union Laïque et Citoyenne des Consommateurs (ULCC). L’objectif étant de mutualiser certaines missions. En contrepartie l’administration s’est engagée et a répercuté une baisse moins forte aux subventions annuelles de nos 3 associations entre 2019 et 2022.

Durant cette période, de bonne foi, nous avons mis en place de nouvelles méthodes de travail en commun, mais ce changement ne se décrète pas, il nécessite du temps pour permettre à chacun de s’adapter. La question de la perte des agréments individuels des associations membres de l’ULCC, n’a jamais été annoncée par l’administration comme un prérequis dès l’horizon 2023.

Il faut également noter que durant cette période, et malgré la pression de l’administration aucun autre regroupement n’a été réalisé par d’autres associations de consommateurs. Les autres associations qui y ont réfléchi, y ont renoncé en raison des nombreuses difficultés que soulèvent ces regroupements. En effet, nos associations sont des structures démocratiques et il faut du temps pour opérer de tels changements qui restent difficiles à mettre en œuvre.

L’administration n’entend pas ces arguments et remet en cause notre bonne foi dans la construction de l’Union Laïque et Citoyenne des Consommateurs.

Une réunion entre l’administration et nos associations a eu lieu, le 15 février dernier. Cette dernière a fait apparaître de nombreuses questions et des incompréhensions de part et d’autres. Celles-ci sont restées en l’état, dans la mesure où aucune suite n’a été donnée à cette réunion.

Jusqu’à la notification de le subvention 2022 à nos trois associations, où l’administration nous met en demeure de faire aboutir le projet ULCC. C’est-à-dire d’accepter de perdre l’agrément de l’ADEIC, l’ALLDC, et CNAFAL, afin qu’elle puisse reconnaître l’agrément de l’ULCC. A défaut, nos associations se verront sanctionner financièrement par une baisse drastique de nos subventions 2023 (-45% par rapport à 2022). Ce qui conduirait inévitablement à des suppressions d’emplois de permanents expérimentés et compétents indispensables au bon fonctionnement des organisations de consommateurs. Rappelons que le budget total alloué aux 15 associations de consommateurs est aujourd’hui inférieur à 1.4 million d’euros soit 0.00033 % du budget général de l’État!

Au moment où l’inflation s’aggrave et approche les 10 %, il serait absurde de baisser les subventions qui servent principalement à financer les salaires et les charges comme l’énergie et les loyers. La logique doit donc conduire à une augmentation des subventions et non à une baisse !

Face à cette situation qui met en péril, la pérennité de nos associations à court terme, nous nous permettons de vous solliciter afin d’obtenir une audience.

Nous vous remercions vivement de l’intérêt portée à notre demande et dans l’attente de votre réponse, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, nos respectueuses salutations.

Patrick MERCIER (ADIEC)                 MARC LAGAE (ALLDC)                                Julien LEONARD (CNAFAL)