Politique Agricole Commune : le Plan Stratégique National Français

Politique Agricole Commune

Après avoir été recalé une première fois, pour « manque d’ambition environnementale et climatique », avec notamment une critique portant sur le soutien insuffisant au Bio, le « Plan stratégique national » français (PSN) de la prochaine PAC (Politique Agricole Commune), pour la période 2023-2027, a été définitivement approuvé par la Commission européenne le 31 août 2022. Il intègre les derniers ajustements négociés entre Paris et Bruxelles et va entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2023.

Ce document de référence de 1800 pages présente la planification stratégique adoptée pour la mise en œuvre de la PAC, au cours des prochaines années. Le PSN, élaboré après une longue concertation (Etat, Régions, professions agricoles, ONG, associations de défense des consommateurs), vise à favoriser le développement d’un secteur agricole plus diversifié et à accompagner la transition agroécologique exigée. Il s’agit également d’assurer le développement social et économique des zones rurales et de montagne. La principale nouveauté de cette PAC est en effet la création des « éco-régimes », des aides facultatives, attribuées pour récompenser des pratiques plus favorables à l’environnement. Les conditions d’accès à ces « éco-régimes » ont fait d’ailleurs partie des points qui ont soulevé le plus de débats. Parmi les faiblesses du plan français initial, Bruxelles avait critiqué en effet le fait que Paris permette aux agriculteurs certifiés « Haute valeur environnementale » (HVE), dont les critères sont bien moins contraignants que le Bio, de bénéficier du plus haut niveau d’aide prévu dans le cadre des « éco-régimes ». Pour répondre aux critiques de Bruxelles, le gouvernement a décidé de rehausser les aides des « éco-régimes » pour les exploitations en Bio, en « créant un niveau spécifique », et de renforcer les exigences (gestion de l’eau, biodiversité, réduction des pesticides) du label HVE, faisant l’objet de critiques. Le Ministère de l’Agriculture a indiqué notamment dans un communiqué qu’il voulait « encourager une diversité renforcée des systèmes de production » et « inciter au renforcement de la résilience du secteur en recherchant la sobriété en intrants » (engrais, pesticides). Le label HVE (Haute Valeur Environnementale) mis en avant dans ce PSN reste cependant contesté par de nombreux acteurs car il permet de continuer à utiliser des produits phytosanitaires dans les exploitations.  Pour atteindre l’ambition fixée d’avoir 18 % de la surface agricole nationale en agriculture biologique en 2027, le budget pour la conversion au Bio est passé désormais à 340 millions d’euros par an. Les aides au maintien du Bio sont en revanche supprimées, ce qui ne parait pas très cohérent. La transition au Bio nécessitant, chacun le sait, plusieurs années.

La nouvelle PAC 2023 – 2027 est dotée d’un budget global de 387 Milliards d’euros, soit près d’un tiers du budget pluriannuel de l’Union européenne.  Dans ce contexte, 270 Milliards d’euros cibleront des aides directes aux agriculteurs. La part qui reviendra à la France sera de 45,2 Milliards d’euros, soit 11,7 % du budget global de la PAC. Face aux impacts de la guerre en Ukraine sur les prix de l’alimentation (pénuries observées pour les céréales, les huiles notamment), et pour atteindre les chiffres de production que s’est fixée la France (en vue d’une meilleure souveraineté alimentaire), les questions de la rotation des cultures et de la biodiversité, du remplacement générationnel des agriculteurs, du développement du Bio, limitant à l’avenir l’utilisation de produits toxiques, nous paraissent être aujourd’hui des objectifs primordiaux.

Politique Agricole Commune – PAC Quelles perspectives pour répondre aux nouvelles problématiques environnementales et climatiques ?

Depuis des décennies, le nombre d’agriculteurs diminue chaque année en France. Ce sont 100 000 exploitations agricoles qui auraient disparu au cours des dix dernières années, ce qui montre à l’évidence l’importance considérable du phénomène dans notre pays (environ 20% des fermes).

Les PAT (Plans Alimentation Territoriaux) en cours de construction pointent tous les enjeux représentés dans les territoires régionaux par le renouvellement générationnel dans le secteur agricole.

Les raisons en sont connues : des métiers peu attractifs actuellement (à cause des nombreuses heures de travail notamment), des aides à l’installation des jeunes insuffisantes par rapport à l’augmentation du foncier et des matériels agricoles, des difficultés de gestion liées à des choix d’exploitation poussant à s’endetter pour produire toujours plus (logique d’exploitation intensive dominante), des prix bas (lait, viande) ne permettant pas une rémunération correcte, à la hauteur des investissements et du travail réalisés. À cela s’ajoute la question des assurances, destinées aux catastrophes climatiques, que tous les agriculteurs ne sont pas en mesure de payer. Les retraites des agriculteurs s’avèrent de plus souvent dérisoires dans notre pays, même quand ils ont travaillé jusqu’à 65 ou 67 ans.

Pas de prise en compte suffisante des enjeux sociétaux identifiés

La nouvelle mouture de la PAC (Politique Agricole Commune) en cours d’élaboration et les futures aides publiques envisagées dans ce cadre, qui devraient être mises en œuvre à partir de 2023, vont-t-elles pouvoir changer la situation ? C’est peu probable compte tenu des choix effectués, sous le poids des lobbyistes probablement.

On va ainsi continuer à distribuer les aides publiques à l’hectare, ce qui fait que 20% des agriculteurs les plus riches, ceux qui ont les plus grosses exploitations (qui ne sont pas en bio), vont toujours pouvoir bénéficier de 80% des aides, sans conditions d’ordre environnemental imposées, notamment en termes d’utilisation de produits phytosanitaires. Dans le contexte actuel, compte tenu des enjeux identifiés, c’est difficilement compréhensible !

D’autres préoccupations sont en effet apparues depuis plusieurs années et vont impacter désormais le monde agricole de façon durable : la problématique du réchauffement climatique, pour les vergers et les prairies notamment, les questions d’ordre environnemental, de plus en plus prégnantes aujourd’hui (l’utilisation accrue des fongicides et pesticides remise en cause).
La progression du bio dans ce contexte est un phénomène à prendre en considération.
Les achats de produits bio augmentent en effet en France depuis plusieurs années et se sont d’ailleurs accentués durant les périodes de confinement liées à la crise sanitaire (plus 5%, au cours de cette dernière année).